EL PAÍS

L’Espagne encouragera le débat sur la création d’une taxe climatique pour les méga-riches en profitant de sa présidence de l’UE

Teresa Ribera lors de la réunion des ministres européens de l’Énergie et de la Transition écologique le 30 septembre à Bruxelles.JOHN THYS (AFP)

La quatrième vice-présidente et ministre de la Transition écologique, Teresa Ribera, entend alimenter le débat en Europe sur la création d’une sorte de taxe climatique pour les grandes fortunes, dans la lignée de ce que propose une étude réalisée sur Laboratoire mondial des inégalités, un projet mené par les économistes français Lucas Chancel et Thomas Piketty. Cet organisme a publié une étude monographique sur les inégalités et la crise climatique et parmi les recommandations les plus innovantes figure la création d’un impôt international sur le patrimoine des plus riches (ils proposent de taxer entre 1,5% et 3% ceux qui possèdent plus de 100 millions de dollars , environ 92 millions d’euros au taux de change actuel). Selon ses calculs, la taxe s’appliquerait à un peu plus de 65 000 personnes et, dans le meilleur des cas —dans lequel tous les pays l’ont mise en œuvre—, 295 000 millions de dollars seraient collectés, ce qui servirait à aider les plus démunis. doivent faire face aux conséquences du réchauffement climatique. « C’est une idée intéressante et innovante, dans la lignée des propositions les plus novatrices, mais il faudra réfléchir à la manière de résoudre les difficultés de son application », indiquent des sources du département dirigé par Ribera.

Lors du dernier sommet sur le climat, qui s’est tenu dans la ville égyptienne de Sharm el Sheikh, les pays les plus riches se sont engagés à créer un fonds pour les pertes et dommages causés par le réchauffement climatique. De plus, ces mêmes nations ont promis il y a plus d’une décennie d’aider financièrement les pays les plus pauvres à s’adapter au changement climatique dont ils sont le moins responsables. Dans un cas comme dans l’autre, le problème est de savoir où trouver l’énorme quantité de ressources nécessaires. De son côté, le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a proposé de taxer les bénéfices extraordinaires des entreprises énergétiques, le secteur qui est le principal émetteur de gaz à effet de serre qui surchauffent la planète.

C’est dans ce contexte que le World Inequality Laboratory lance sa proposition de taxe climatique. Les auteurs sont conscients qu' »un accord mondial sur une taxe sur l’extrême richesse pour financer l’adaptation et l’atténuation du changement climatique est peu susceptible d’être conclu dans un avenir proche ». Mais ils considèrent qu' »une mesure de ce type peut être initiée par un groupe de pays sans qu’il soit besoin d’un consensus » lors des sommets climatiques de l’ONU. « Par exemple, si les États-Unis et les pays européens mettaient en place une telle taxe, ils récolteraient environ 175 000 millions chaque année » : 121 000 aux États-Unis et 56 000 en Europe. Il s’agit d’une somme importante qui « pourrait être totalement ou partiellement redistribuée vers un fonds mondial pour le climat, sans frais pour 99,99% de la population de ces pays », indique le rapport préparé par ce groupe d’économistes français. « Étant donné les niveaux extrêmes actuels de concentration des richesses dans le monde, même des taux d’imposition modestes sur les plus grandes richesses peuvent générer des recettes fiscales substantielles », ajoutent les auteurs.

Étude « solide et concluante »

Des sources de la Transition écologique affirment que « le vice-président analysera cette proposition avec beaucoup d’intérêt, d’autant plus que l’Espagne présidera l’Union européenne lors de la célébration de la COP28 », le prochain sommet de l’ONU sur le climat qui aura lieu en fin d’année à Dubaï . « L’étude est solide et concluante : il y a une relation directe entre la richesse individuelle et les émissions par habitant », affirment les mêmes sources.

Le rapport proposant la création de la taxe pour les super-riches part du postulat de l’existence d’inégalités dans les causes et les conséquences du changement climatique. Les auteurs de l’étude déclarent : « Les impacts climatiques ne sont pas uniformément répartis dans le monde : en moyenne, les pays à revenu faible et intermédiaire subissent des impacts plus importants que leurs homologues plus riches. Dans le même temps, la crise climatique est également marquée par d’importantes inégalités au sein des pays. Si vous allez aux causes, vous trouvez aussi un énorme déséquilibre. « Tous les individus contribuent aux émissions, mais pas de la même manière », note l’étude. « Les 10% des plus grands émetteurs mondiaux de dioxyde de carbone génèrent près de la moitié de toutes les émissions de gaz à effet de serre » de la planète, donnent en exemple ces économistes dans leur étude, qui a le soutien de la Agence norvégienne de coopération au développement et le Programme des Nations Unies pour le développement.

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Ribera, qui a consacré une partie très importante de sa carrière professionnelle aux politiques sur le changement climatique, connaît bien les responsables du Laboratoire mondial des inégalités. Chancel, qui est l’auteur principal du rapport dans lequel la taxe verte pour les plus riches est proposée, était l’associé de Ribera lorsque le vice-président dirigeait l’Institut du développement durable et des relations internationales (IDDR) à Paris, entre 2014 et 2018. A cette époque À l’époque, cet économiste étudiait déjà la relation entre les revenus et les émissions de gaz à effet de serre.

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