La France regorge de centrales nucléaires
Le plus petit explique parfois le plus grand. Le monde cherche où trouver l’énergie pour continuer à fonctionner sans détruire la planète. Pour certains pays, les centrales nucléaires sont la solution. C’est le cas de la France. D’autres, comme l’Allemagne ou l’Espagne, ont décidé de renoncer à cette source d’énergie. Pendant ce temps, il y a des villes de quelques milliers d’habitants où le dilemme est vécu à fleur de peau. Dans les zones dites à risque – le rayon de cinq kilomètres autour d’une centrale nucléaire – les questions sur les bénéfices et les risques de l’atome font partie du quotidien. Une bénédiction? Ou une condamnation ?
Il y a quelque chose dans ces cantons de ces villes du Far West où l’on avait trouvé une mine d’or ou un puits de pétrole. Ils nagent généralement en abondance et jouissent du plein emploi. Les infrastructures sont optimales. La centrale nucléaire rayonne de prospérité. En même temps, la présence physique de l’usine est une réalité incontournable : un rappel permanent que les cheminées et les installations ne sont pas une usine typique. Malgré la probabilité statistiquement très faible d’un accident, si un jour cela se produit – comme cela s’est produit à Tchernobyl en 1986 ou, déclenché par un tsunami, à Fukushima en 2011 – les conséquences peuvent être terrifiantes.
Certains arguments locaux pour et contre trouvent écho aux niveaux national, européen et mondial. Pour l’énergie atomique : elle est propre, si par propre on entend qu’elle n’émet pas de gaz à effet de serre, puisque la question des déchets reste ouverte. Et il est censé garantir la souveraineté énergétique. Contre : les risques encourus et le gaspillage. Et un autre : son coût, qui détourne les efforts des investissements dans les énergies renouvelables.

C’est un débat qui n’est pas résolu en Europe, mais l’invasion russe de l’Ukraine et la fin de la Russie en tant que fournisseur fiable d’énergie l’ont accéléré. Elle confronte la France nucléaire à l’Allemagne dénucléarisée. Le président français Emmanuel Macron a lancé un nouveau programme atomique qui conduira à la construction de 6 à 14 nouveaux réacteurs. Le chancelier Olaf Scholz, à la tête d’une coalition à laquelle participent les Verts, a fermé les dernières centrales nucléaires de son pays, conformément à un plan de son prédécesseur, Angela Merkel. Les Français rappellent qu’en renonçant au nucléaire, l’Allemagne devra continuer à dépendre un temps d’un charbon très polluant. Les Allemands rappellent que cet automne et cet hiver, lors de la plus grave crise énergétique de ces dernières années, environ la moitié des réacteurs français ont été arrêtés en raison de problèmes de corrosion des tubes et de tâches de maintenance reportées pendant la pandémie. Et le pays qui aurait dû jouir de l’indépendance énergétique grâce à ses centrales a fini par importer de l’électricité.
La France, deuxième pays au monde avec le plus de réacteurs nucléaires, est un terrain d’essai. Dans des communes comme Braud-et-Saint-Louis, Saint-Paul-Trois-Châteaux, Petit-Caux ou Belleville-sur-Loire, tous ces débats ne sont pas abstraits, mais touchent des vies bien précises dans des lieux bien précis. Le photographe Ed Alcock a visité ces lieux et a rencontré ces personnes. Et il le raconte avec des images et des mots. Il l’a fait dans le cadre d’une commande titrée et promue par le ministère français de la Culture et la Bibliothèque nationale, dans le style des programmes documentaires des années 1930 aux États-Unis. Il en résulte une histoire française et européenne qui parle de notre présent et de notre avenir, de nos certitudes et de nos peurs. Le portrait microscopique d’un défi universel.



Ed Alcock (MYOP)





Ed Alcock (MYOP)