Cécile Lochard, directrice du développement durable chez Guerlain : « En étant ambitieux, le luxe peut éduquer »
« Ce n’était pas prévu », raconte Cécile Lochard (Dijon, France, 48 ans) à propos du cliché choc d’Angelina Jolie couverte d’abeilles, posant dans le magazine « Elle était l’image des parfums Guerlain et quand en 2020 on a créé le programme Des femmes pour les abeilles Nous lui avons proposé d’être leur ambassadrice. Il n’y a pas pensé, il a dit oui et il a aussi eu cette idée. » Le haut-parleur de l’actrice et le portrait insolite ont permis à ces photographies d’être vues par 3 milliards de personnes, soit près de la moitié de la population mondiale. «Ça a permis de sensibiliser», ajoute la directrice du développement durable de la maison française lors de son passage à Madrid. Elle vient précisément dans la ville pour promouvoir ce programme qui vise à promouvoir l’entrepreneuriat féminin et à sensibiliser à l’importance de la biodiversité, en mettant l’accent sur les abeilles.
La relation de la marque avec cet insecte remonte à plus de 170 ans ; Il figurait déjà gravé sur le flacon en verre de l’Eau de Cologne Impériale que Pierre-François-Pascal Guerlain offrit à Eugenia de Montijo à l’occasion de son mariage avec Napoléon III. Une coïncidence historique qui sert de point de départ : « C’est une chance d’avoir l’abeille comme emblème car elle nous oblige, très humblement, à travailler à sa conservation. Nous faisons bien plus, mais cela représente nos efforts. L’abeille est importante pour la planète entière, sans pollinisateurs et sans biodiversité nous ne pourrions pas vivre, mais nous avons réalisé que beaucoup ne sont pas conscients de cela, ni du syndrome d’effondrement des colonies. [la desaparición inexplicable y repentina de todas las abejas melíferas de una colmena]. Les causes sont multiples : changement climatique, pesticides, monocultures, manque de diversité florale… mais on estime que 30 % de notre alimentation dépend directement des pollinisateurs, notamment des abeilles. »
Un luxe responsable
Comme pour la photo de Jolie, une partie du travail de Lochard consiste à rendre la durabilité attrayante : « Il y a un effet indirect car, étant ambitieux, le luxe peut éduquer. « À l’heure actuelle, le luxe et l’art sont les deux principaux conteurs. » Elle a été pionnière dans le domaine : elle travaille dans le domaine du développement durable depuis plus de 25 ans et en 2011 elle a publié le livre (« Luxe et développement durable : une nouvelle alliance »). « Je suis née dans une famille très engagée, mon père travaillait dans la finance durable donc je n’avais d’autre choix que de suivre cette voie. Je l’ai toujours su, depuis que j’ai dit, à l’âge de quatre ans, que je ne voulais plus manger de viande. Je rêvais d’être le nouveau Noah et de sauver les animaux, c’est comme ça que j’ai fini par travailler au WWF », se souvient-il. En ce qui concerne le marché, la conscience environnementale n’était pas la norme : « C’est maintenant que les entreprises et les gouvernements se rendent compte de tous les dégâts ; Les choses évoluent plus vite que jamais. Surtout parce que le changement climatique n’est plus un changement, c’est une crise.»
À l’heure actuelle, le luxe et l’art sont les deux principaux conteurs.
Il est aujourd’hui chargé de revoir les processus, de mesurer les impacts et de les améliorer : « Le luxe a ses singularités, comme des packagings très volumineux. Nous avons voulu repenser les codes et il y a quelques années nous avons réduit les nôtres de moitié. Et tu sais quoi? Rien ne s’est passé ». Tout n’est pas si simple, car chaque changement implique de nombreux aspects. Ils ont reformulé la collection Aqua Allegoria avec de l’alcool biologique, avec l’intention d’appliquer ce changement à l’ensemble de leur offre de parfums, mais « pour le moment, c’est impossible, car nous achetons tout l’alcool biologique produit. Nous devons procéder progressivement à la transition des fournisseurs. Le problème en suspens, avoue-t-il, est celui des transports : « C’est le domaine dans lequel j’aimerais le plus accélérer, car honnêtement, nous dépendons toujours du transport aérien et nous devrions utiliser uniquement les navires. C’est ce qui obsède actuellement notre PDG et toute l’équipe. Parce qu’aujourd’hui, travailler sur le développement durable ne se fait plus de son côté, mais il faut plutôt collaborer avec tous les départements. »