"Nous coulons !" : l'Australie va accueillir des "réfugiés climatiques" de Tuvalu

« Nous coulons ! » : l’Australie va accueillir des « réfugiés climatiques » de Tuvalu

« Nous coulons ! », tel était le message urgent envoyé à la COP26 depuis Tuvalu par son ministre des Affaires étrangères impeccablement habillé, Simon Kofe, et avec l’eau qui monte dangereusement au-dessus de ses genouxs. « Nous ne pouvons pas attendre les discours, alors que le niveau de la mer monte autour de nous. »

Deux ans après cette vidéo choc, qui place le troisième plus petit pays du monde sur la carte du changement climatique, une bonne nouvelle arrive enfin : l’Australie intensifie ses efforts et s’apprête à ouvrir « une route spéciale de mobilité » pour 280 habitants par andans ce qui est considéré comme le premier accord international reconnaissant implicitement l’existence de « réfugiés climatiques ».

Et pas seulement : le géant australien s’engage également à fournir une aide en cas de catastrophes naturelles, et à cofinancer le Tuvalu Coastal Adaptation Programme, dans le but de gagner 6% des terres de la mer dans la capitale, Funafuti, pour tenter de retarder le moment où le petit pays sera dévoré par les eaux (peut-être dans la seconde moitié du siècle).

L’accord, scellé aux Îles Cook par le Premier ministre de Tuvalu Kausea Natano et son homologue australien Anthony Albanese, a évidemment une contrepartie géostratégique et sécuritaire. Après tout, Tuvalu est l’un des rares pays de Polynésie à entretenir des relations diplomatiques avec Taiwan. Le nouveau traité est également un moyen de contrer l’influence croissante de la Chine dans la région, les Îles Salomon et Kiribati voisines se tournant vers Pékin.

Les Premiers ministres d'Australie et de Tuvalu, Anthony Albanesede et Kausea Natano.

Disons que Tuvalu est plus ou moins à mi-chemin entre Canberra et Honoluluet rappelons-nous que l’espagnol Álvaro de Mendaña Il fut le premier explorateur européen à naviguer entre les neuf atolls (dont deux déjà submergés) qui finirent par devenir un protectorat britannique sous le nom d’Îles Ellice et obtint son indépendance en 1979.

Tuvalu couvre un peu plus 26 kilomètres carrés, et a été admis par l’ONU comme son 189ème membre en 2000. Ses habitants sont environ 11 000, et son économie est tournée vers la mer, d’où vient aussi la menace : le point culminant des îles dépasse à peine les quatre mètres. Il est classé parmi les pays les plus vulnérables au changement climatique et sa voix s’est jointe à celle de tous les pays insulaires qui, entre autres mérites, ont poussé à inclure la limite de 1,5 degré dans le réchauffement climatique. Accord de Paris.

« Nous voulons sauvegarder l’avenir de Tuvalu », a déclaré l’Australien Anthony Albanese au moment de sceller l’accord. « C’est pourquoi nous allons également apporter une aide en matière d’adaptation et de sécurité, pour préserver en même temps leur culture et leur identité en tant que nation. »

Kausea Natano, qui se définit comme « le leader d’un pays qui sera bientôt sous les eaux », a remercié l’Australie pour son soutien et a averti que l’accord permettrait « une immigration dans la dignité », puisque ce faisant, nous éviterons une « fuite des cerveaux » précipitée qui accélérerait le déclin de Tuvalu. Environ 280 citoyens de l’archipel pourront accéder chaque année à un visa de résidence et à un permis de travail en Australie, ainsi qu’à l’accès à ses services publics.

L’accord « mobilité spéciale » a été bien accueilli dans des endroits aussi reculés que États-Unis ou Union européenne, le considérant comme une ligne directrice d’action pour les autres pays face à l’augmentation du nombre de «réfugiés climatiques». Aldam Bandt, leader du Parti vert australien, a cependant mis le doigt sur le problème : « Il vaudrait mieux que le Parti travailliste cesse de causer des dégâts et arrête d’approuver de nouvelles mines de gaz et de charbon. »

Anthony Albanese, du Parti travailliste, a marqué un tournant dans la politique climatique après sa victoire en 2022 sur le conservateur et négationniste Scott Morrison. Albanese a cependant été critiqué pour avoir continué à autoriser l’extraction de combustibles fossiles et pour ne pas s’être engagé à réduire davantage ses émissions.

« Si le Premier ministre veut démontrer son engagement en faveur du changement climatique, il doit mettre un terme à tous ces projets, comme l’exige la société civile auprès des dirigeants », a-t-il déclaré. Gardien le porte-parole de Paix verte pour le Pacifique Shiva Gounden. Lavetanalagi Seru, coordinateur régional du Réseau Action Climat, est parvenu à une conclusion similaire : « L’accord entre l’Australie et Tuvalu ça peut finir par être un patch si la contribution des combustibles fossiles à la crise climatique n’est pas abordée. »

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